La dissimulation du télétravail depuis l’étranger est un motif de licenciement, a rappelé le conseil des prudhommes de Paris dans un récent arrêt.
Cette chronique est proposée par Alexandre Fraval, avocat en droit du travail, rémunération et avantages sociaux, et chargé d’enseignement.
Par un jugement rendu le 1er août dernier, le conseil de prud’hommes de Paris a validé le licenciement pour faute grave d’une salariée télétravaillant depuis l’étranger.
Cette dernière n’avait notamment pas obtenu l’accord préalable de son employeur.
Plus précisément, le conseil a retenu que la salariée avait adopté une attitude déloyale à l’égard de son employeur. Elle a dissimulé son télétravail à l’étranger à son employeur et elle a refusé de cesser le télétravail comme il lui avait été demandé.
Le conseil de prud’hommes a également fondé sa décision sur les risques juridiques encourus par l’employeur à raison de cette situation.
De multiples risques
Ces risques sont notamment relatifs au droit de la sécurité sociale, au droit fiscal et à la législation relative à la protection des données personnelles.
En effet, au regard du droit de la sécurité sociale, l’installation du salarié dans un pays tiers pour y télétravailler est susceptible d’entraîner l’obligation pour l’employeur de cotiser au régime local de sécurité sociale.
D’un point de vue fiscal, la présence du salarié à l’étranger peut entraîner la caractérisation d’un « établissement stable » générant pour l’employeur un risque de double imposition.
Enfin, ce type de télétravail peut engendrer un risque de violation de règlement général sur la protection des données personnelles (RGPD).
Sans viser l’exhaustivité, on pourrait y ajouter les risques relatifs à l’absence d’autorisation de travail du salarié dans le pays concerné et à la responsabilité de l’employeur au regard de son obligation de sécurité.
Un avenant au contrat de travail
Pour sécuriser le recours à ce type de télétravail, plusieurs actions peuvent être mises en place.
D’abord, si la situation est individuelle (ou ne concerne que peu de salariés), il vaut mieux la formaliser par la signature d’un avenant au contrat de travail du/des salarié concerné(s).
Cet avenant permettra de définir les horaires de travail pour tenir compte d’un éventuel décalage horaire. La durée de recours à ce mode d’organisation du travail ainsi que ses modalités de réversibilité pourront également y être précisées.
C’est aussi un bon moyen pour l’employeur d’encadrer la prise en charge des frais liés au télétravail.
Si plusieurs salariés sont concernés, il conviendra de formaliser ces règles par le biais d’un accord collectif ou d’une chartre.
Au-delà des points précédemment évoqués, cela permet d’objectiver la mise en place du télétravail à l’étranger en déterminant notamment les catégories de salariés pouvant en bénéficier, les modalités d’autorisation et les pays au sein desquels le télétravail peut être effectué.
Une attestation sur l’honneur
En matière de sécurité sociale, si la législation d’un autre État est applicable, il est possible d’envisager la mise en place d’un payroll local et d’affilier les salariés aux régimes volontaires de sécurité sociale pour les expatriés.
Concernant la protection sociale complémentaire, il convient de veiller à bien s’assurer que les contrats souscrits par la société couvrent les salariés pendant les périodes de télétravail à l’étranger.
Attention, en pratique, peu de contrats couvrent les salariés qui télétravaillent à l’étranger. Dans une telle situation, il est préconisé de solliciter une modification contractuelle auprès de l’organisme assureur.
Enfin, concernant l’obligation de sécurité de l’employeur, ce dernier est invité à solliciter des salariés la remise d’une attestation sur l’honneur de conformité de leurs installations électriques et de les informer des risques en cas de non-conformité.