De plus en plus utilisée en cas de soupçon d’harcèlement, l’enquête interne se conclut par un rapport dont le contenu et la diffusion sont encadrés. Voici les points à retenir.
Cette chronique partenaire est rédigée par Corinne Baron-Charbonnier, avocate associée du cabinet Vivant Avocats.
Le recours aux enquêtes internes s’est progressivement imposé en cas de signalement de situations de harcèlement moral ou sexuel.
Si l’enquête n’est pas automatique, elle reste une étape indispensable à défaut d’éléments suffisamment précis et concordants pour déterminer si les faits dénoncés sont avérés, sanctionner l’auteur des faits et assurer l’effectivité de l’obligation de sécurité de l’employeur due aux salariés.
Quelle que soit l’issue de l’enquête, il n’est pas obligatoire, mais vivement conseillé de rédiger un rapport. Il va permettre de vérifier les conditions de déroulement de l’enquête et la conclusion des enquêteurs sur l’existence ou non d’une situation de harcèlement.
Les récentes recommandations de la Défenseure des droits – décision-cadre n°2025-019 du 5 février 2025 – viennent confirmer les pratiques à suivre en termes de contenu et de diffusion du rapport d’enquête.
Un contenu structuré
Aucune règle légale ne précise le contenu du rapport, mais il est généralement préconisé que le rapport comprenne un exposé des faits et leur signalement ainsi que les mesures de protection mises en œuvre.
La procédure suivie y est détaillée. Le rapport doit préciser les noms et fonctions des enquêteurs, la durée de l’enquête, le nombre et l’identité des salariés entendus, leurs fonctions, service ou équipe d’appartenance, les étapes de l’enquête, les difficultés rencontrées (refus d’audition, incohérence d’un témoignage), les éléments de preuve recueillis et les justifications de la personne mise en cause sur l’ensemble des faits signalés.
Enfin, le document va exposer les conclusions de l’enquête sur l’existence ou non d’une situation de harcèlement, avec les recommandations des enquêteurs. La rédaction des conclusions se prononçant sur la qualification juridique de la situation doit être soignée.
Ces recommandations viseront généralement les mesures concrètes à adopter immédiatement et à l’avenir : sanction à l’égard de la personne mise en cause, mesures de soutien à la victime et aux salariés concernés par les faits révélés, mesures préventives requises telles que la mise en place de formations sur le harcèlement au travail ou sur les pratiques managériales requises.
La rédaction du rapport doit rester factuelle et impartiale (ni jugement de valeur, ni appréciation d’ordre médical comme le souligne la Défenseure des droits). L’objectivité est essentielle à la valeur probante du rapport. Enfin, le rapport devra être signé de l’ensemble des enquêteurs.
Une diffusion contrôlée
La conservation du rapport d’enquête par l’employeur est primordiale pour préserver la confidentialité des informations qu’il contient, tels que les échanges avec les salariés entendus. Sa diffusion doit être strictement encadrée et rester limitée.
Ainsi, en cas de procédure disciplinaire, la communication au salarié mis en cause des éléments recueillis lors de l’enquête ne peut être imposée à l’employeur.
Une version anonymisée et synthétique – rédigée en plus du rapport – peut être transmise, avec l’accord de la victime ou de l’auteur du signalement, aux représentants du personnel en charge des questions de santé sécurité.
Cette synthèse, limitée à la méthodologie, aux étapes de l’enquête et à ses conclusions, mais expurgée de toute donnée sensible et identité des témoins à protéger, peut également être remise à la victime.
En cas de doute, et afin de sécuriser les différentes étapes de l’enquête, l’accompagnement d’un conseil juridique reste de rigueur.