EXCLUSIF. Dans un rapport d’analyse confidentiel, la legaltech Predictice détaille les villes de France où les contentieux d’indemnités d’occupation de baux commerciaux sont les mieux pris en compte par la justice. Délais, taux de reconnaissance, indemnités, voici les chiffres à retenir.
S’il y a bien un contentieux qui semble avoir le vent en poupe depuis la crise du Covid, c’est celui des baux commerciaux. Les commerçants fermés durant le premier confinement en 2020, car considérés comme « non essentiels », cherchent toujours un moyen de faire valoir le non-paiement de leurs loyers sur cette période.
Saisie de trente pourvois sur différents fondements, comme la destruction de la chose louée et la perte d’exploitation, la Cour de cassation les a tous déboutés le 30 juin dernier (cf notre newsletter abonnée du 3 juillet).
Derrière ces cas particuliers, c’est toute la relation contractuelle entre un locataire commercial et un bailleur qui est en cause. Depuis 2017, selon un rapport confidentiel de la legaltech Predictice auquel « Lex Daily News » a eu accès, seules 4 596 décisions rendues par les trente-six cours d’appel de l’Hexagone ont concerné les contentieux d’indemnités d’occupation de ces baux.
Des délais raisonnables
L’éviction du bail commercial, c’est-à-dire l’acte par lequel le propriétaire décide de reprendre le local loué et de mettre fin au bail (ce qu’il est autorisé de faire tous les trois ans), est l’une des premières causes de contentieux entre le bailleur et le commerçant.
L’autre motif de discorde concerne la résiliation du contrat de bail pour cause de loyers impayés. Dans ce cas précis, le propriétaire est en droit de rompre le contrat sans verser d’indemnités au locataire. Il peut lui demander dans un premier temps, par acte d’huissier, de réguler la situation dans un délai imparti.
Si le locataire ne respecte pas ce délai, avant de saisir la justice, le propriétaire peut entamer une conciliation. De son côté, le commerçant en difficulté a la possibilité de demander un délai pour le paiement devant le tribunal judiciaire s’il ne trouve pas un terrain d’entente avec son bailleur. Les délais sont, d’ailleurs, beaucoup moins longs que dans d’autres conflits.
D’après Predictice, il faut compter en moyenne un an et huit mois entre le tribunal judiciaire et la cour d’appel puis un an et cinq mois de plus pour un pourvoi en cassation. Pour rappel et à titre de comparaison, en matière d’harcèlement moral au travail, le délai moyen entre la première instance et l’appel est de deux ans et dix mois.
Une forte acceptation, peu d’indemnités
Que ce soit le propriétaire ou le locataire à l’origine du contentieux, le taux d’acceptation devant les cours d’appel s’élève en moyenne à 74%, selon le rapport de Predictice.
L’un des taux les plus élevés concerne la cour d’appel de Caen : 83% des 225 demandes que ses juges ont eu à connaître depuis 2017. À Aix-en-Provence, la deuxième juridiction à avoir traité le plus de dossiers de ce type après Paris (1220), 68% des 582 dossiers ont été accepté.
Parfois le motif invoqué n’est pas le bon, dans d’autres cas, le juge a renvoyé les parties dos à dos. C’est devant la cour d’appel de Grenoble que le risque de rejet est le plus élevé (43%) juste devant celle d’Orléans (41%).
Enfin, il est intéressant de noter que des indemnités ont été prononcées que dans 782 affaires sur les 4596 relevées par Predictice.