La Cour de cassation, dans deux arrêts rendus le 11 mai, confirme que l’encadrement des indemnités par le « barème Macron » s’appliquera systématiquement, en cas de licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Ce mercredi 11 mai, la Cour de cassation a mis un terme à de nombreuses interrogations juridiques portant sur le très contesté « barème Macron », utilisé pour encadrer le montant des indemnités, en cas de licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Créé par l’ordonnance du 27 septembre 2017, ce barème indique le montant de l’indemnité versée en fonction de l’ancienneté du salarié, en cas de licenciement sans cause réelle et sérieuse reconnu par le conseil de prud’hommes.
Par exemple, un salarié licencié sans cause réelle et sérieuse, disposant d’un an d’ancienneté obtient entre un à deux mois de salaire brut comme indemnités.
À l’autre bout du barème – précisé à l’article L235-3 du Code du travail –, licencié dans les mêmes circonstances après trente ans d’ancienneté ou plus, l’ex-salarié reçoit vingt mois de salaire brut comme indemnités du préjudice subi, maximum.
Bon à savoir : un autre barème est prévu pour les entreprises de moins de 11 salariés. Entre un et deux ans d’ancienneté, l’indemnité maximale s’élève à un demi mois de salaire brut. Et pour les plus anciens, soit 10 ans et plus d’ancienneté, l’indemnité ne peut pas excéder deux mois et demi de salaire. |
Le préjudice en question
Certains conseils de prud’hommes et des cours d’appel avaient décidé de ne pas systématiquement appliquer ce barème Macron et de prendre en compte la situation réelle du salarié.
Ces juridictions estimaient que les montants prévus par le barème ne réparaient pas toujours suffisamment le préjudice subi.
« Avant ce barème, lorsqu’un salarié d’une entreprise employant plus de 11 salariés voyait son licenciement reconnu comme sans cause réelle et sérieuse, il était assuré d’obtenir au moins 6 mois de salaire », détaille l’avocate Carine Cohen, associée du cabinet Walter Billet Avocats.
D’autres juges n’appliquaient pas ce barème trouvant qu’il n’était pas conforme au droit international, particulièrement à l’article 10 de la Convention n°158 de l’Organisation internationale du travail.
« Le barème avait pour objectif de créer une homogénéité des indemnités. Avant, les décisions prud’hommales pouvaient différer d’une juridiction à l’autre, ce qui créait une insécurité juridique et une vraie disparité entre les justiciables », rappelle François Hubert, avocat spécialiste du droit social, associé du cabinet MGG Voltaire Avocats.
Une application automatique
Dans deux arrêts rendus le 11 mai dernier, la Cour de cassation clarifie sa position. Elle écarte la possibilité d’apprécier l’application du barème en fonction de la situation du salarié.
D’après la plus haute juridiction judiciaire un tel scénario « créerait pour les justiciables une incertitude sur la règle de droit applicable, qui serait susceptible de changer en fonction de circonstances individuelles et de leur appréciation par les juges et porterait atteinte au principe d’égalité des citoyens devant la loi, garanti à l’article 6 de la Déclaration des droits de l’homme de 1789 ».
« Les juges refusent de faire le distinguo selon les anciennetés des salariés dès lors qu’en cas de licenciement discriminatoire, il est possible de déplafonner le barème », précise Carine Cohen.
Quelle différence entre licenciement pour cause réel et sérieuse et licenciement discriminatoire ? Souvent utilisé par les salariés devant les prud’hommes pour contester la rupture de leur contrat de travail, le licenciement sans cause réelle et sérieuse est fondé dès lors que le motif avancé par l’employeur n’est pas démontré. Il sera considéré comme « nul » s’il est prononcé en violation d’une liberté fondamentale, en lien avec une situation de harcèlement moral ou sexuel, décidé de manière discriminatoire, etc. |
Un barème conforme aux textes internationaux
De fait, pour la juridiction suprême judiciaire, il ne fait aucun doute que l’application du barème permet une réparation adéquate du préjudice subi.
« La Cour de cassation rappelle qu’il existe d’autres moyens pour réparer le préjudice d’un salarié en complément du barème. Si le licenciement est reconnu sans cause réelle et sérieuse, l’employeur peut aussi être condamné à rembourser les indemnités chômage versées à l’ancien salarié dans une limite d’un délai de 6 mois », ajoute François Hubert.
« Le barème non seulement tient compte de l’ancienneté du salarié et de son niveau de rémunération, mais son application dépend de la gravité de la faute commise par l’employeur », insiste la Cour de Cassation justifiant ainsi que ce texte est bien conforme à l’article 10 de la Convention n°158 de l’Organisation internationale du travail.