Directive CSRD : l’ampleur du risque

Cette récente directive européenne sur la gouvernance sociale et environnementale des entreprises comporte les germes d’importants contentieux à bien anticiper.

Cette chronique partenaire est rédigée par Philippe Bouchez El Ghozi, avocat, associé du cabinet Jeantet.

La directive Corporate Sustainability Reporting (CSRD) renforce les obligations des entreprises en matière de transparence.

Elle permet d’évaluer leur impact sur les critères ESG et d’apprécier leur niveau d’engagement sur ceux-ci.

Son objectif est de rendre les informations communiquées plus exhaustives en harmonisant les normes de reporting, en imposant un audit des rapports par un commissaire aux comptes.

Ce texte élargit aussi le périmètre des entreprises qui devront mettre en œuvre ces mesures. Plus de 50 000 organisations seraient concernées.

Des reporting entre 2025 et 2028

Les entreprises européennes réunissant au moins deux des critères suivants devront établir un premier reporting en 2025 basé sur l’année 2024 :

– Plus de 500 salariés ;
– Plus de 40 millions de chiffres d’affaires ;
– Plus de 20 millions de bilan.

Celles de plus de 250 salariés ou réalisant un chiffre d’affaires de 40 millions ou un bilan de plus de 25 millions l’effectueront en 2026 pour l’année 2025.

Les PME cotées sur les marchés européens sont aussi visées par cette directive.

Si elles comptent plus de 10 salariés avec un chiffre d’affaires de 900 000 euros ou plus de 450 000 euros de bilan, leur premier reporting est attendu en 2027 pour l’année 2026.

Les organisations ayant réalisé plus de 150  millions de chiffre d’affaires dans l’Union européenne le feront en 2028 sur l’année 2027.

Un impact à double sens

Ce reporting porte sur des facteurs environnementaux (ex. : utilisation des ressources), sociaux (conditions de travail, respect des droits et libertés fondamentales, etc.) et de gouvernance (rôle des organes d’administration, relations avec les partenaires commerciaux, etc.).

Chaque entreprise devra expliquer en quoi elle impacte le changement climatique et comment celui-ci impacte ses activités et son plan de transition (impacts physiques et financiers).

Une analyse rigoureuse des risques devra être présentée et la société justifiera de sa capacité d’adaptation au changement climatique.

Prévenir avant de punir

La France a transposé cette directive le 6 décembre 2023 dans une ordonnance en assortissant le non-respect des obligations précitées de plusieurs sanctions.

Les entreprises, qui ne sont pas en conformité seront astreintes, par la voie des référés, à produire dans de brefs délais les documents ou informations requises en matière de durabilité. 

Elles pourront être exclues des marchés publics dès le 1er janvier 2026.

Les dirigeants au cœur des sanctions

La directive prévoit aussi des sanctions pénales pour l’entreprise et son dirigeant.

Si aucun commissaire aux comptes n’a été désigné ou les informations portant sur la durabilité n’ont pas été certifiées, l’entreprise pourra être condamnée à 150 000 euros d’amende.

Son dirigeant risque alors deux ans de prison et 30 000 euros d’amende.

Lorsque les auditeurs n’ont pas pu contrôler et vérifier correctement les informations en termes de durabilité, les sanctions s’élèvent à 75.000 euros d’amende et cinq ans d’emprisonnement pour le dirigeant ainsi que 375 000 euros d’amende pour l’entreprise.

Ces sanctions s’inscrivent dans un mouvement de pénalisation de l’information environnementale et dans un contexte de remise en cause de la collaboration des professionnels avec les autorités publiques (greenwashing).

Gageons que la chambre des contentieux émergents récemment créée au sein de la cour d’appel de Paris, compétente pour statuer sur les contentieux liés au devoir de vigilance et à la publication d’informations en matière de durabilité, sera promue à un bel avenir au vu de l’ampleur des sujets de litiges soulevés par la directive CSRD.

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