Le travail dissimulé en hausse devant la justice

EXCLUSIF. Les contentieux pour travail dissimulé, c’est-à-dire les contrats et heures de travail non déclarés à l’Urssaf, ont atteint un record historique en 2023. Explications chiffrées.

Le constat est sans appel. « En 2023, les redressements pour le travail au noir ont atteint près de 1,2 milliard d’euros », a annoncé le Premier ministre Gabriel Attal, le 1er mars dernier.

Ces redressements d’entreprises par l’Urssaf ont augmenté de 50% par rapport à l’année dernière où ils avaient plafonné à 788 millions d’euros.

Autant d’argent perdu pour l’État qui récupère 60% des cotisations salariales et patronales sur les contrats de travail.

La lutte contre le travail non déclaré devrait donc s’intensifier. Le Premier ministre a d’ores et déjà annoncé la création de 240 postes supplémentaires d’ici à trois ans.

La hausse de ce travail dissimulé s’est aussi ressentie devant la justice, les salariés lésés demandant des comptes.

La dissimulation d’heures supplémentaires

D’après un rapport confidentiel de la legaltech Predictice, auquel Lex Daily News, a eu accès, les trente-six cours d’appel de l’Hexagone ont rendu 1727 décisions sur ce sujet en 2023. À titre de comparaison, en 2022, il y a 1495 dossiers de ce type et seulement 1077 en 2020.

Extrait du rapport d’analyse « Travail dissimulé » de Predictice

Cette hausse s’explique, car la non déclaration d’un contrat de travail ou d’heures supplémentaires porte préjudice au salarié concerné qui se fait souvent licencier lorsqu’il le souligne à son employeur.

Selon Predictice, le taux d’acceptation par la justice de ce type d’affaires est de 52%. Il démontre la difficulté d’obtenir de telles indemnités.

En effet, c’est au salarié de prouver que votre employeur a volontairement dissimulé vos heures supplémentaires ou votre contrat de travail.

La difficulté de prouver

Démontrer qu’elles n’ont pas été payées, car elles n’apparaissent pas sur votre fiche de paie alors que vous étiez bien sur votre lieu de travail, par exemple, ne suffit pas. Toutes les preuves sont acceptées. Plus elles seront nombreuses comme des témoignages, des manquements sur les fiches de paie, des relevés faux, plus les juges pourront apprécier.

À retenir : Si l’employeur ne remet pas de contrat de travail écrit au salarié, celui-ci est considéré par la loi comme étant en CDI à temps plein.
L’absence d’écrit ne suffit donc pas, en elle-même, à caractériser le travail dissimulé.

14 000 euros d’indemnités

Toutefois, si vous vous lancez dans ce type de procédure, mieux vaut prendre son mal en patience.

D’après l’analyse de Predictice, la durée moyenne de la procédure entre les prud’hommes et la cour d’appel est de 2 ans et 5 mois.

Enfin, notons que le travail dissimulé entraîne la rupture du contrat de travail, établi de fait avec le salarié en cause, l’employeur visé doit à son salarié non déclaré une indemnité forfaitaire égale à six mois de salaire.

Extrait du rapport d’analyse « Travail dissimulé » de Predictice


Cette indemnité peut être cumulée avec d’autres comme celle des congés payées, l’indemnité pour licenciement abusif, etc.

Son montant moyen s’élève à 14 000 euros, selon Predictice, soit 5 fois le salaire mensuel brut.

À lire aussi : Justice, Le remboursement des indemnités chômage en chiffres

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